" Mes amis , réveillons-nous . Assez d'injustices ! " L'Abbé Pierre

mardi 2 juin 2015

Des français qui ne comprennent plus les règles du jeu ...

Comment les classes moyennes Françaises bouclent les fins de mois … mon, notre histoire.


 
 

 






Compter les centimes avant d'aller faire ses courses, jongler avec les petits jobs non-déclarés pour sortir la tête de l'eau. Rien de scandaleux. Pas de quoi pleurer non plus. C'est l'histoire d'un quotidien, celui de millions de français. Ceux d'une classe moyenne qui passe souvent à la trappe. Pas assez misérable pour être vendue par une classe politique forcément désintéressée et bienveillante, pas assez riche pour être économiquement utile à la croissance.


Des aides sociales, ils en ont un peu et des impôts, ils en payent, toujours plus ou pas du tout dans ils ont touché le fond. Ces invisibles représentent près d'un tiers de la population française. Le coup de grâce, c'est cette crise dont ils ne voient pas la fin. Une France dans laquelle chacun se reconnait. Des tranches de vie, de souffrances et de rêves aussi. Des visages posés sur une caste désincarnée, sortir de l'abstrait pour montrer la réalité, écorchée, rapiécée.

C'est l'histoire de la dépression, l'alcool, la famille fragilisée. 500 euros, c'est souvent tout ce qui leur reste pour vivre à la fin du mois. Le travail, on s’y accroche, comme à la promesse d'un avenir meilleur, celui qui leur fait oublier les injonctions et autres mises en demeure des prestataires qui s'amassent dans sa boîte aux lettres.




Des français qui ne comprennent plus les règles du jeu
 
 
La république, ils y croyaient, la respectaient, il n'y a pas si longtemps de cela. Le plus dur, c'est d'expliquer les restrictions du quotidien aux enfants : Je ne veux pas les victimiser, ils ne sont responsables de rien. Nous avons notre petit appartement, nous sommes propriétaires. Il y a pire que nous. Mais comment font les gens qui n'ont pas d'argent de côté, expliquez-moi? Des français qui croyaient aux promesses de la croissance, de l'emploi. Jouer le jeu de la progression sociale, trop lente, d'une solidarité partagée, trop lourde. Ils n'y arrivent plus. Encaisser des coups, résister, pour gagner quoi à la fin? La classe moyenne se sent trahie.

Je ne suis pas Al Capone, je n'ai pas le droit, je sais, mais c'est grâce aux petits jobs au 'black' que je m'en sors avec deux enfants en bas age.

C'est toujours avec une pointe d'humour dans la voix, à la fois âpre et piquante …

mes ressources: pas de salaire fixe ! une aide de Pôle Emploi 450 euros par mois ! Avec nos enfants, je reconnais ne "jamais avoir eu besoin de beaucoup. Mais un seul revenu , le salaire de 1200 euros de madame pour sa petite famille, c'est dur". Maman bohème, elle cherche de la poésie dans la privation . Nos exigences, c'est que du matériel, rien de grave, tout va bien. Fataliste, mais pas lorsqu'il s'agit de l'avenir des enfants. Avec mon fils, on dort dans le salon. On fait comme on peut.

C'est la première fois depuis 30 ans que le budget de la classe moyenne connait une telle diminution. La part du budget consacrée aux dépenses courantes représente plus de la moitié des salaires. Dans la classe moyenne, les familles sont fragiles et vulnérables. Les salaires des femmes sont souvent la seule et unique ressource à laquelle se raccrocher.




Garder l'estime de soi, le challenge le plus exigeant
Une perte d'emploi stigmatise. Les membres d'un couple cherchent le responsable, se défaussent, accusent, se déchirent. Le capital social d'une famille soudée est un véritable atout. Même si aller voir ses parents, à 40 ans, c'est une claque en pleine figure. J’ai travaillé chez PSA Citroën pendant 20 ans. J’avais une belle maison, des meubles, une piscine puis j’ai été licencié comme un mal propre. Après mon licenciement , le divorce. Puis j’ai utilisé mes maigres économies apres un divorce compliqué pour mon procés contre mon employeur .Puis la descente en enfer a continué. J’ai continué à payer ma pension alimentaire de 900 euros tant que j’ai pu avec mes 450 euros de rsa.

Un enfant quitte le foyer, une part fiscale en moins et une centaine d'euros en trop, il faut payer les impôts.

Je bataille avec les dossiers, les demandes d'échelonnement, les imprimés. Des photocopies, des justificatifs pour payer en quatre fois. Le parcours du combattant. Du fatalisme et de la lassitude …

les factures d'eau, de gaz et l'électricité, la cantine, la nounou, c'est plus des ¾ de nos ressources ! on arrive à 1248 euros de charges sur 1700 euros de revenus à deux. On aimerait avoir un peu plus … on ne peut se nourrir comme il faut , il y a d’ailleurs bien longtemps qu’on ne mange plus de viande … je suis trop fatiguée pour m'énerver.

En France, la petite classe moyenne est taxée à hauteur de 43% de ses revenus. Un sentiment d'injustice !




Et les enfants dans tout ça?
Les parents tentent de les épargner autant qu'ils peuvent. Les enfants ne sont pas dupes. La souffrance des parents, ils la partagent, tout en feignant de ne pas la voir par pudeur, par égoïsme parfois.

Artiste dans l'âme, mon fils sacha improvise un rap avec ses copains du centre social dans sa chambre. Il parle de sa mère, lui chante ce qu'il n'ose pas lui dire. Il parle des galères et des sacrifices, "Je suis toi, tu es moi, on est les mêmes". Les yeux de sa mère rougissent. Elle tourne le visage vers la fenêtre entre-ouverte de la cuisine, prétexte une cigarette pour expirer une volute où se mêlent la nicotine et l'émotion. Rachel, nous nous en sortirons …

Un avenir confisqué par la privation.

Dans les années 60, il fallait 12 années de travail pour avancer d'une catégorie sur l'échelle sociale. Il en faudrait aujourd'hui 20 pour la même ascension. La classe moyenne perd pied, ne croit plus en la politique.

La traiteur du quartier, Karine, ouvre sa boutique tôt le matin. Malgré ses efforts, son chiffre d'affaire s'effondre au fil des ans. Elle gagne entre 500 et 600 euros par mois. Surtout, ne lui parlez pas de "commerce de proximité" ou de "lien social". Son commerce, c'est une affaire bien gérée. Elle en est fière. C'est pour cela qu'elle attend de la reconnaissance. Sa place dans le quartier, elle l'a déjà gagnée à côté des incontournables, la boulangerie, le tabac, mais ca ne suffit plus pour vivre.

En 2013, 8500 commerces ont déposé le bilan. On trouve d'un côté, les gagnants de la mondialisation et de l'autre, les perdants, condamnés aux emplois menacés, fragiles, interchangeables et précaires. Quand l'économie toute entière devient discount, les emplois intermédiaires relèvent du luxe. En France, en 2013, plus de 1000 boutiques de presse mettent la clé sous la porte. 80 heures de travail par semaine, ca laisse peu de temps pour le recul, l'introspection ou un nouveau choix de vie.

Je , on ne cherche pas de coupable, quoique ! c'est aussi l'histoire d'une lutte contre soi-même : de l’echec de la creation de sa petite entreprise en nom personnel apres le licenciement à la formation de reconversion compliquée malgres tout à vendre dans son cv quand on a deja (et pourtant seulement !) 47 ans , c'est aussi l'histoire d'une lutte contre soi-même …

Une tranche de vie, ma vie, mon histoire s'inscrit dans une volonté assumée de sonder les réalités sociales de la France d'aujourd'hui, résolument humain .

Parce que je, on n’est pas les seuls ; que nous sommes 10 millions comme nous …

Un peu de lumière sur ces dix millions de Français qui vivent avec 1 200 euros par mois pour une personne seule et une moyenne de 2 600 pour une famille de deux enfants.

Pudeur et justesse, le quotidien de notre familles face au chômage et à la crise à travers notre combats, nos résistances et nos espoirs …
 




 

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